« Certes » par les Enjoliveurs au festival du cirque, superbe spectacle

La Cie L’Enjoliveur a fait le plein pour ses trois représentations au festival du cirque. Regard rétroactif sur un superbe spectacle.

Au cirque, les clowns vont par deux : le clown blanc et l’Auguste. Le clown blanc dit à l’Auguste ce qu’il doit faire et celui-ci rate tout et fait rire. On n’aime pas le clown blanc, trop rigide et autoritaire, et on s’identifie à l’Auguste qui fait échouer toutes les entreprises du Blanc, libre, transgressif, intouchable… Dans la vie comme au cirque, on est fasciné par la liberté de ceux qui ne rentrent pas dans les clous, même si la vie nous oblige souvent à rentrer dans le rang.
Dans le nouveau cirque, le schéma explose mais l’idée est encore là. « Certaines choses, quelquefois, il faut les voir pour y croire et d’autres fois, il faut y croire pour les voir… », dit le Blanc en début de spectacle, avant de se mettre dans la peau d’un cheval. Au cinéma comme au cirque moderne, la croyance transcende le réel. Le couple de clowns de la Compagnie L’Enjoliveur ne porte ni nez rouge ni maquillage ni habit flamboyant, mais se bagarre et s’invective tout autant. Mouloud a un nom maghrébin : c’est signifiant dans un monde où l’Autre est méprisé. L’Auguste sait répondre et se défendre face au Blanc (Igor), croiser le fer et étonner par sa virtuosité.
Dans « Certes », ces deux-là cherchent à capter l’attention d’une belle voltigeuse et danseuse sur corde, elle aussi ô combien virtuose (Anaïck). Elle mène la danse, de son grand lasso, et Igor le cheval devra faire des tours de piste et sauter à la corde, vite rejoint par Mouloud qui le chevauchera ironiquement.
Ils la poursuivent sans cesse avec leur fleur, mais la Belle reste de marbre et leur échappe. Et les voilà partis pour moults démonstrations de bravoure burlesque, jusqu’à sauter périlleusement sur trampoline jusqu’au sommet du chapiteau. Quand le Blanc prend le dessus, par exemple en élevant la Belle à bout de bras ou la recueillant habilement dans sa chute, l’Auguste n’est pas loin, qui sait tirer agilement parti des situations. Mouloud est toujours là, intrus qui ne lâche pas, dont on ne se débarrasse pas, même à la place de la Belle dans la malle, jusqu’à être là pour de bon.
Harry l’accordéoniste essaye lui aussi une fleur. Personnage énigmatique, anti-clown, il intrigue sans davantage de succès. Et tout cela n’aurait pas assez de rythme sans Jonathan le Goéland au clavier et Nickolson à la régie lumières.
Les gradins sont pleins, les applaudissements nourris, les rires récurrents et les sourires permanents. On n’oublie pas le chapiteau des Enjoliveurs.
O.B.

Certes 2015 from pacomoth on Vimeo.