Le tunnel

Avant le tunnel

2 mars 1978 : Dauphiné Libéré

A l’heure où les plus hautes instances administratives, techniques et artistiques, répondant aux vœux ardents des habitants et de tous ceux qui portent intérêt à la vie culturelle et à la qualité de l’environnement, se penchent sur le sort des Pilles, afin d’y améliorer la circulation routière et de le restaurer aussi bien dans ses constructions que dans ses activités, il n’est pas inutile de jeter un regard sur le passé de ce beau village dont le nom s’inscrit à de nombreuses reprises dans l’histoire.

Le touriste qui arrive pour la première fois aux Pilles ne peut manquer d’être frappé par la beauté du site naturel, et le caractère du village construit le long de l’Eygues entre deux massifs montagneux très proches l’un de l’autre.

En fait, la majeure partie des habitations qui remontent au 18ème  siècle, sont serrées les unes contre les autres, et serrent de très près elles-mêmes la route des Alpes, empêchant à certains endroits le passage des véhicules à double sens, ce qui a motivé les études et les projets de notre époque, de faciliter Ieur débit toujours plus intense.

Le nom même des Pilles provoque chez ce touriste des réminiscences scolaires qu’accentue encore la vision de ce défilé étroit. Et ce rapprochement avec les Thermopyles n’est pas absurde, car depuis les importantes découvertes effectuées récemment non loin d’ici, au Pègue, il est certain que les Grecs eurent une importante activité commerciale dans notre région où ils introduisent par surcroît la vigne et l’olivier.

Or, pour ces grands voyageurs la vallée de l’Eygues permettait une pénétration en direction des Alpes, six siècles déjà avant Jésus-Christ. Les Romains qui conquirent le pays et l’occupèrent quelques 5 siècles plus tard employaient le mot «pila», dont nous avons fait pilier, et qui pouvait lui aussi s’appliquer au détroit des Pilles.

De toute évidence, celui-ci se trouvait sur une voie maîtresse en direction de l’Est et il est admis qu’Hannibal l’emprunta avec une partie de son armée, 237 ans avant Jésus-Christ, quand il voulut aller détruire Rome.

Le général carthaginois venait du Rhône par St-Paul-Trois-Châteaux, le Pègue, Novezan et après avoir longé l’Eygues, aux Pilles*, il gagna Curnier, Arpavon, Ste Jalle.

Puis Poët-Sigillat, Tarandol, le Col de Soubeyran pour redescendre dans la haute vallée de l’Eygues d’où son armée, par Rosans, Trescléoux et Montjay n’avait plus de cols ni de gorges étroites à franchir pour rejoindre la vallée de la Durance et passer en Italie par le Mont Genèvre.

Le guerrier africain prenait ainsi le grand chemin celtique qui allait devenir la voie romaine dite Domitienne destinée à faire communiquer Arles avec Milan par Gap. Certains habitants des Pilles parlent encore des dalles, attribuées aux Romains, qu’on remarqua quand on construisit la route nationale au 19ème  siècle et dont on retrouva encore des exemplaires au 20ème siècle quand on commença à goudronner les chaussées.

En fait, ce chemin, auprès duquel furent découverts, au lieu-dit «les Donnes» à la limite du territoire des Pilles et de Curnier, les tronçons d’un monument funéraire élevé à la mémoire d’une dame romaine, devait au cours des siècles qui suivirent, atteindre un état assez lamentable puisqu’on 1783 un arrêté du conseil d’Etat prévoyait la construction d’une route qui, venant de Pierrelatte et passant par Nyons et Rosans devait mettre en contact permanent le Languedoc et l’Italie, faciliter le débit des huiles et savons, arrêter les émigrations d’habitants et prévenir les disettes.

La monarchie finissante, la révolution et l’empire ne permirent pas l’ouverture d’une véritable grande voie de communication et il fallut attendre 1830 pour que fût décidée la construction d une roûte nationale, la 94 qui, empruntant nette fois la vallée de l’Eygues ferait communiquer Pont~St-Esprit, à Briançon. Le premier tronçon par Sahune, n’allait que jusqu’à Villeperdrix, puis la route fut poursuivie jusqu’à Rosans où existait déjà une route qui rejoignait Gap et Briançon par Serres. Les travaux ne furent achevés qu’en 1861.

Depuis, de nombreuses améliorations ont été apportées à la 94, et des nouvelles sont encore en cours. La traversée des Pilles par un tunnel court, préconisée par la municipalité, accroîtra encore l’intérêt de cette grande voie si importante économiquement, socialement et touristiquement.

Les routes

Le val de Ste-Jalle, bien que n’étant pas doté de voies royales, était une région de passage assez fréquentée. La « route » de Nyons – Rémuzat, passait par Curnier, Arpavon, Montréal, Sahune, Villeperdrix, St-May : le passage par les gorges de l’Eygues ne sera ouvert qu’après 1850 ; Nyons –Serres par Ste-Jalle, Gouvernet et Verclause

(Félix Terrand- actes du 100è congrès national des sociétés savantes . Paris – 1975 P. 250- Mairie d’Arpavon)

 … c’est le moment (1861) où l’on achève la route nationale 94 entre le pied de Villeperdrix et Rosans (ibid. P.274)

Ecrits anonyme de novembre 1927 :           rédaction d’écolier ?

La route qui sépare Nyons de Les Pilles est une route nationale portant le n°) 94, qui part de Pont-St-Esprit à Briançon.

C’est une des plus vieille route de la région puisque c’est Napoléon 1er (alors Consul Bonaparte NDLR) qui la fit faire pour se rendre en Italie pendant la guerre de 1796.

Sur les bords on aperçoit encore les grosses pierres plates qu’il faisait mettre pour résister aux lourds chariots qu’il devait y faire passer.

La distance qu’il y a de Nyons aux Pilles est de 6 km. C’est le coin de la route que je connais le mieux car souvent je me rends à Nyons.

C’est une route très fréquentée, elle donne communication à beaucoup de petits villages dont les gens viennent s’approvisionner soit aux Pilles soit à Nyons. Elle dessert en outre une grande partie des Alpes. Aussi voit-on les camions, automobiles, motos, vélos ou charrettes passer en grand nombre tous les jours.

La route est très pittoresque, par endroit elle est enclavée entre le rocher et la rivière qui coule à une certaine profondeur et dont le courant vient se heurter au rempart de la route dans un bruit d’enfer. De l’autre côté se dresse les rochers aux formes bizarres qui en été, attirent beaucoup de curieux venant de toutes les provinces et même de l’étranger. Tout le longe n’est pas si curieux mais pas moins désert non plus, puisqu’on a encore assez de prairies ou des vergers d’oliviers. A mi chemin se trouve un petit village appelé Aubres.

Sur la route, le hameau du village avec les écoles communales, un café ou deux, et un marchand de bois et charbon.

De pittoresque, la route devient accidentée à cause de tournants brusques que lui oblige à faire la rivière et les éboulements qui se produisent surtout au moment des pluies.

C’est la route que j’aime le mieux car elle me rappelle beaucoup de souvenirs et bonnes promenades entouré de parents ou amis.

La guerre du tunnel

Un projet hallucinant fut évoqué dans les années 70 : la destruction de toutes les maisons côté Eygues pour agrandir la route ! Rien de moins !

Il y eut une levée de boucliers pour faire échouer ce projet dément, et en particulier l’édition d’un numéro spécial de l’association Art de Basse-Normandie, par les soins de Mr René Le Désert, pour dénoncer un tel massacre.

Numéro Spécial

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